Renaissance - Azure d'or

1979 Warner bros 56 633 dist. WEA

 

Groupe légendaire et tourmenté, Renaissance est né de la dissolution des Yardbirds. On pouvait s'attendre de la part de Keith Relf et Mac Carthy à une réédition d'un enfer électrique. Il n'en fut rien ! Et le groupe, rejetant le rock des années 67, se lançait dans un Classique adapté, teinté de l'esprit rock. Mais les affaires ne marchent pas bien fort. Si les membres du groupe s'en vont alors un par un, le nom de Renaissance ne meurt pas pour autant. Des amis d'amis aux amis du groupe remontent le Band en 1971. Et Renaissance repart dans la même ligne musicale avec cette différence près : aucun membre original n'est resté.

Et ce nouveau Renaissance semble avoir la peau dure, puisqu'aucun de ses 6 membres n'a changé depuis sa recréation. 8 albums en 8 ans, dont un double en public; une régularité chronique qui leur vaudra un succès, non pas en Europe où ils sont boudés, mais aux USA où ils s'exilent dès les années 74 (leur dernière prestation à Paris remontant en 1975 à l'Olympia, en avant-programme de Caravan). De plus, les disques ont été distribués irrégulièrement. Ainsi, entre Novella (1977) et Azure d'or (1979), il y avait Song for all seasons (1978) dont nous n'avons aucune trace de pressage français (...).

Azure d'or n'est pas le meilleur album pour accrocher et pour goûter au Génie de la musique de Renaissance. Toutes les réserves pressenties dans Song for all seasons se sont confirmées dans ce LP. Le duo des compositeurs, Dunford pour la musique et Thatcher pour les textes, a régressé puisqu'il ne signe plus que 4 des 9 titres, les 5 autres étant écrit par le bassiste Jon Camp. John Tout, fidèle jusqu'en 1977 à son piano acoustique, se lance définitivement dans les claviers électroniques. De même pour Dunford qui consent à quitter de temps en temps sa guitare Ovation pour une guitare électrique. Car n'oublions pas que, jusqu'en 1977, le groupe consolidait son image de mini orchestre symphonique, adaptant des compositions de leur cru dans un style classisant, tout en gardant la structure d'orchestre pop avec une section rythmique, Sullivan-Camp, de choc (ayant été comparée de nombreuses fois à celle de Yes : Bruford, White, Squire).

Le groupe tend de plus en plus à se séparer de son aspect symphonique au profit d'une chanson plus américaine, perdant par là même son originalité. Azure d'or se dirige irrémédiablement dans ce sens, même s'il renferme une bonne moitié de choses bien agréables.

La voix fantastique d'Annie Haslam rayonne toujours par sa douceur enfantine et ses aigus fragiles. Les compositions Thatcher-Dunford se distinguent de celles de Camp par leur côté plus ballade, plus rengaine, la guitare acoustique servant de toile de fond. Exemples : "Winter tree", "Golden key" ou "Friends". Celles de Camp se veulent plus grandiloquentes, plus percutantes et nuancées. Les claviers tiennent alors la place de de soliste. C'est le cas de "Only angels have wings" et de "Discovery", un instrumental de 4'23''.

Et quand Dunford-Camp se retrouvent à signer le même morceau, cela donne "The flood at Lyons", un fade compromis dans lequel les claviers (violons et chœurs) de John Tout tendent à noyer tous les autres instruments (voix y compris) dans une masse symphonique confuse. On a beau tourner et retourner Azure d'or et en mémoriser les formes plaisantes, il manque quelque chose. Une chose qui faisait la force de Novella, de Scheherazade, de Ashes are burning, de Prologue, de Turn of the cards. Il manque des nuances, des endroits de silence, des instruments mis en relief, et le piano acoustique soliste de Tout (nom du pianiste), incomparable dans toutes les variations de thèmes classiques. Même la voix d'or d'Annie a perdu une partie de son efficacité, sa voix ne pouvant être mise en valeur que sur des passages frêles et peu orchestrés.

Il ne faudrait acheter pas moins de 9 albums de Renaissance, soit la totalité de la discographie du groupe, et en particulier les 2 sommets de pop symphonique-classique que sont Scheherazade et Novella (en particulier "Can you hear me call" et "Sisters") avant d'investir votre argent dans Azure d'or. A vous d'en tirer les conclusions, vis-à-vis de votre porte-monnaie !!!!!!

LUC MARIANNI Le 19 avril 1975 à l'Olympia